Pour un parti communiste à nouveau utile
Le
divorce entre les moyens extraordinaires qu’offrent les sciences et les
techniques développées jusqu’à la révolution informationnelle et l’accaparement
de ces moyens par le capitalisme mondialisé, exacerbe dans tous les domaines,
l’aliénation, de l’immense majorité au profit de quelque uns. Nous vivons dans
un pays en régression sociale depuis 3 décennies. La question du dépassement du
capitalisme et donc du communisme reste posée avec force, et ce, à l’échelle du
monde. Que les électeurs français qui subissent cette régression sociale n’aient
pas choisi un vote conforme à leurs intérêts de classe ne change pas la
problématique. Cela pose par contre, la question de la clarté de " l’offre
politique novatrice et révolutionnaire " et de sa crédibilité appuyée par des
actions.
Au dernier CN, Marie George Buffet qualifie de manière surprenante sa candidature aux présidentielles de " candidature communiste de rassemblement ". Dans le brouillage général de cette campagne électorale, qui a vu Sarkozy s’approprier la valeur "travail", Marie George s’est toujours présentée comme la candidate de la gauche populaire et antilibérale au même titre d’ailleurs que J. Bové (même si ce dernier n’avait aucune légitimité des collectifs). À partir du résultat des présidentielles (avant pour certains), de nombreux dirigeants communistes concluent que la question de l’existence du parti communiste est en cause. Ce n’est pas toujours dit aussi frontalement mais c’est bien de cela qu’il s’agit.
Quand P. Cohen Seat dit " Comme on ne change pas un peuple, c’est nous qui devons nous changer " il ne vise pas à une critique de la stratégie qu’il a fortement contribué à mettre en œuvre, stratégie qui a conduit à l’impasse du rassemblement. Il choisit de projeter une autre organisation et aussi un autre contenu, basé dit-il, sur les valeurs " Liberté, Egalité, Fraternité, Solidarité " très en retrait sur les valeurs du communisme et laissant, dans les faits, intact le marché capitaliste. Exit nos propositions de droits nouveaux et d’autres financements mettant les banques, y compris la BCE au service de l’emploi… Il est vrai que dès que l’on aborde au CN certaines questions comme la sécurité d’emploi et de formation, cela fait beaucoup rire certains.
Dans son interview du Parisien du 11 mai, JC Gayssot estime qu’ " il est temps de dépasser la référence stricte au parti communiste ". Il pose la question " A, quoi serviraient de prolonger des références qui n’ont plus d’avenir ? " Mais ministre, n’a-t-il pas largement contribué, à brouiller ces références avec la privatisation de l’Aérospatiale ou en justifiant auprès des salariés de la Snecma l’ouverture du capital et les réductions d’effectifs d’Hispano au nom de la compétitivité ? De son côté, R. Martelli nous donne le coup de grâce avec son analyse des résultats électoraux du parti. Mais n’a-t-il pas une responsabilité alors que lui et quelques autres comme Zarka mettent depuis quelques années toute leur énergie au service d’un pseudo rassemblement, en fait un regroupement au sommet d’organisations politiques sans base ?. La majorité de " ces camarades " ont d’ailleurs soutenu la candidature de J. Bové !
Cette stratégie de rassemblement n’a pas marché. Voilà que l’avenir serait dans le modèle du Links partei, parti allemand rassemblant le PDS (dont les communistes) de l’Est qui n’ont jamais réussi à s’implanter à l’Ouest et les déçus, dont O. Lafontaine, de la politique libérale conduite par la sociale démocratie implantée à l’Ouest. Outre que les conditions historiques sont extrêmement différentes, cela marchera-t-il ? Sont-ce les idées de transformations sociales communistes qui seront dominantes dans ce nouveau parti, ou les idées de régulation sociale-démocrate du capitalisme.
Face à une baisse quasi régulière de nos scores, la solution est-elle de construire un autre parti, électoraliste, comme le préconise M. Laurent dans son débat avec JL Mélanchon ? Après l’affirmation que : " la question de la création d’une nouvelle force politique n’est pas taboue ", il assigne au congrès de 2007 l’objectif d’être " une étape qui pourrait déboucher sur " un programme de travail commun " à engager avec d’autres, sans raccourci, pour élaborer un projet qui permette de gouverner pour changer, pour réfléchir à l’outil, le parti, qui peut porter de tels objectifs, et pour voir avec qui il serait possible de la construire. Objectif : gouverner et faire un parti dans cet objectif en rassemblant sans doute la gauche du PS et toute la gauche dite antilibérale.
N’est-ce pas la raison qui pousse P. Zarka, dans une autre version de fin du PCF, à proposer " un cadre unitaire mêlant plusieurs voix " dans lequel " les communistes ont leur propre partition à jouer ". En fait, un parti avec une tendance communiste !
Que serait l’efficacité d’un tel rassemblement, à visée électorale, d’organisations dont les objectifs sont très différents. Rappelons-nous le propos de M. Onfray nous expliquant qu’il est anti-libéral mais défenseur du capitalisme !
Le parti communiste ne transformera pas seul, la société, c’est l’évidence. Mais Le rassemblement indispensable pour le changement n’est-il pas plutôt à construire sur des objectifs précis appuyés sur la lutte qui reste encore le meilleur vecteur de rassemblement des salariés et du peuple. On ne change pas un peuple ?. Les contacts militants et de nombreuses études montrent un fort rejet du capitalisme. Alors faut-il baisser la barre de nos objectifs de dépassement ou faut-il créer les conditions pour que non seulement le peuple ait conscience que le capitalisme est dépassable mais aussi qu’il agisse dans ce dessein ?
N’a-t-il pas besoin de propositions de luttes pour améliorer sa vie tout de suite mais ouvrant des perspectives de changement durables ? N’a-t-il pas besoin d’un parti communiste ?
Certes pas le parti, tel qu’il est actuellement. Il y a besoin d’une profonde novation de celui-ci.
Déjà se bouger. Par exemple sur l’emploi : être à l’initiative d’actions, non pas le coup médiatique et sans lendemain mais des actions tenaces jusqu’à la conquête des objectifs. Les moyens de satisfaire ces objectifs, comme les droits nouveaux des salariés et citoyens, l’utilisation et la mobilisation des crédits et du système bancaire, nourriraient le débat et permettraient à tous de se les approprier, de les faire évoluer. Répondre à la fois à de formidables besoins de formation dans le parti et renouer avec un véritable travail théorique permettrait de mieux comprendre la société d’aujourd’hui pour mieux asseoir des repères révolutionnaires qui font défaut. Un fonctionnement réellement démocratique permettrait aux communistes d’être maîtres de leurs choix.
C’est en mettant en œuvre cette novation que le PCF retrouvera une base sociale opérante pour changer le monde.