Hommage aux soldats soviétiques tombés en France

À Haubourdin, feu sur le révisionnisme en cours

Comme tous les ans, le 8 mai, un rassemblement à la nécropole militaire d’Haubourdin (près de Lille) a rendu hommage aux soviétiques tombés sur le sol français durant la Seconde Guerre mondiale. Pour ce 80ᵉ anniversaire, les organisateurs ont vigoureusement dénoncé la réécriture de l’Histoire.

À Haubourdin, on dénombre 200 tombes de soviétiques morts entre 1940 et 1945. Entouré de représentants de l’association mémorielle « Mémoire russe », du PCF et d’un membre de l’ambassade de Russie en France, William Roger (Union pour la reconstruction communiste) a servi un long et très documenté exposé sur cet épisode de notre Histoire.

Ces hommes morts dans le nord de la France étaient essentiellement, a-t-il rappelé, des soldats de l’Armée Rouge arrêtés par les Allemands sur le front de l’Est, des civils réquisitionnés par les forces d’occupation nazie à l’Est et transférés en France pour servir de main d’œuvre, notamment dans les mines et pour la construction d’ouvrages défensifs comme le Mur de l’Atlantique.

Il y avait aussi des immigrés russes et ukrainiens d’avant-guerre qui avaient participé à la grande grève des mineurs de 1941.

Une section russe du FTP MOI

L’organisation de l’évasion de prisonniers (une stratégie de l’Armée Rouge qui voulait créer un second front en France) a joué un rôle important dans la résistance intérieure. La FTP MOI a eu sa section russe devenue, en raison de ses actions spécifiques, le Comité central des prisonniers de guerre soviétiques (CCPGS). Au cimetière militaire d’Haubourdin, des noms importants, artisans de cette organisation, ont résonné : le colonel FTP Boris Matline (connu sous le pseudonyme Gaston Laroche), les lieutenants Vladimir Postnikov et Vasil Porik, le capitaine Vasily Taskin, le commissaire politique Mark Slobodinski, l’officier Ivan Skrypai.

Selon l’association « Mémoire russe », environ 10 000 militaires soviétiques ont été tués sur le sol français durant la Seconde Guerre mondiale. « Voilà une partie de notre Histoire méconnue. C’est un honneur pour nous de la faire connaître ! » s’est exclamé William Roger.

Mais aujourd’hui, sur fond de tensions internationales et de guerre en Ukraine, nous assistons à une réécriture de l’Histoire, voire à une vraie opération de révisionnisme. Il y a 80 ans, en juin 1945, le quotidien américain New York Herald Tribune écrivait que « l’Armée Rouge a été de fait l’armée qui a libéré l’Europe et la moitié de notre planète (…). » Le général De Gaulle estimait que « Les Français savent ce qu’a fait la Russie soviétique et savent que c’est elle qui a joué le rôle principal dans leur libération ».

Inversion des chiffres et déboulonages

À l’époque, les sondages (celui de l’Ifop notamment) révélaient que 57% des Français pensaient que l’URSS était la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne nazie. 20% citaient les États-Unis. Aujourd’hui, les chiffres sont inversés, et cela ne date pas du conflit entre l’Ukraine et la Russie. Selon un sondage réalisé par l’Ifop en 2015, l’URSS n’était plus citée que par 23% des sondés, et les États-Unis étaient cités par 54%.

Dix ans plus tard, le révisionnisme historique est au plus haut. Le Parlement européen, dénonce William Roger, dans son intervention du 8 mai, en est le premier responsable. « En septembre 2019, il a adopté une résolution tirant un signe égal entre le nazisme et le communisme, et indiquant que l’événement déclencheur de la Seconde Guerre mondiale est le pacte germano-soviétique d’août 1939 ! C’était ainsi passer sous silence les complicités puis les ralliements à l’Allemagne hitlérienne des classes dirigeantes de la plupart des pays occidentaux, qui conduira à l’Anschluss de l’Autriche en mars 1938, aux accords de Munich de septembre 1938 avec l’annexion des Sudètes, à l’invasion de la Bohême-Moravie en mars 1939… »

En 2024, le Parlement européen franchit un pas supplémentaire en adoptant une résolution qui appelle à construire une « mémoire historique européenne commune ». Sans dire un mot sur le passé de l’Ukraine. Sans évoquer non plus la loi dite de « décolonisation » adoptée en Ukraine en 2023. Cette loi supprime le statut protégeant le nom des lieux associé à la lutte contre l’occupant nazi dans ce pays. C’est l’époque du déboulonnage des statues des chefs partisans de la Seconde Guerre mondiale.

Philippe Allienne , Liberté Actus.

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